Et finalement, Valérie Pécresse.

Les militants du parti “Les Républicains” ont fait leur choix : ce sera Valérie Pécresse, dont il se dit qu’elle inquiéterait plus “la Macronie” parce que moins clivante que certains (désormais ex) candidats putatifs de la droite.

L’histoire dira (plus exactement les électeurs diront) si le président sortant, qui est parvenu à préserver un demi million de nos concitoyens de la pauvreté devant la crise sanitaire ; qui est parvenu à infléchir la pensée unique du capitalisme financier au profit du capitalisme plus rhénan des trente glorieuses ; qui est parvenu à remettre l’investissement au cœur de l’école, au cœur des compétences et de la production, avec une vision à dix ou vingt ans ; qui est en passe de faire de l’apprentissage la voie d’entrée d’excellence dans la vie active ; qui a redonné à la France un leadership politique en Europe ; bref, l’histoire dira si ce président sortant là, bientôt candidat, avait des raisons d’être inquiété. Cela s’appelle porte un nom : la démocratie.     

Il faut doublement saluer le choix de Valérie Pécresse qui, à défaut de solutionner franchement la question du manque de “leadership naturel” au sein du parti Les Républicains, a le mérite de tenter d’endiguer la radicalisation dont celui-ci a été le spectacle depuis plusieurs années. Puisse ce choix interne des militants aider à sauver la Présidentielle du danger de bipolarisation « progressistes Vs bloc des radicalités ». Car il serait un angle mort, catastrophique en termes d’abstention.        

Ainsi la Présidentielle 2022 comptera, à minima, deux candidatures animées par la pensée libérale, et cela fait du bien ! Du bien aux idées. Du bien au débat. Du bien à la démocratie…

Mais ce sont aussi deux candidatures opposées dans leur lecture économique du libéralisme politique.  

Le premier, Emmanuel Macron, est un social libéral, soucieux de placer l’expression de cette liberté économique dans le cadre des organisations sociales pour en prévenir les dérives et contenir les inégalités, promouvoir l’universalisme (qui est le substrat de la République française) et promouvoir l’égalité des chances (qui a été et reste le défi). On pourra toujours discuter la nuance, débattre de ce qui a été accompli ou pas, critiquer le style. Mais presque cinq années de bilan laissent peu de doutes sur cet ADN politique.

La seconde, Valérie Pécresse, se revendique de Thatcher et de Merkel. Deux références éminentes, mais quelque peu audacieuses, si l’on y réfléchit, dans le logiciel de cohésion économique et sociale “à la française”. A vrai dire, il s’agit de références plutôt curieuses pour qui ambitionne de parler non plus aux seuls militants de droite (0.25 % du corps électoral) mais bien à 40 millions de Français. Demain, une autre campagne commence…

Il sera temps, pendant la campagne, d’expliquer aux “moins de 2000 € par mois” (seuil des ménages qui a beaucoup fait débat ces dernières semaines et pourtant déjà supérieur au revenu médian) les conséquences d’une décennie du “there is no alternative” outre-manche dans le quotidien des Britanniques, à des années lumières du “quoi qu’il en coûte” (et avec un poids de la dette public aujourd’hui à peine moins lourd outre-manche).

De la même façon, les dernières élections en Allemagne (où, pour mémoire, le successeur désigné d’Angela Merkel n’a pas été élu) ont été l’occasion pour les Français de regarder un peu plus entre les lignes de l’insolente santé économique outre-rhin. Un endettement certes moindre mais au prix d’un déficit d’investissement public y constitue désormais le défi d’un pays vieillissant. Tôt ou tard, l’Allemagne devra réfléchir à son “France stratégie”. La politique française, avec effets leviers prometteurs en matière d’insertion et d’accompagnement de la transition, n’y suscite plus le même dédain que naguère, y compris des les milieux économiques…

Bref, l’herbe est toujours plus verte chez le voisin, à condition de penser à entretenir son propre jardin. Certes, les références off shore sont toujours bienvenue pour enrichir un logiciel politique, mais il faudra bien rapidement s’atteler à parler aux Français des Français, substituer le quotidien aux slogans, et chasser les images d’Epinal pour dire ce qui est faisable et ce qui ne l’est pas – et surtout à quel prix.      

Valérie Pécresse est probablement sincère quand elle réclame la suppression de 200 000 fonctionnaires. Dommage que les quatre débats de la primaire aient à ce point occulté une réalité qui pourrait désormais empoisonner la dialectique de campagne des Républicains jusqu’à la veille du premier tour. C’est un fait, sauf à vouloir affaiblir un peu plus le Régalien à un moment où les Français aspirent à mieux de Police, mieux de Justice, mieux d’Etat, les marges de manœuvres théoriques d’une telle politique ne se situent qu’à deux endroits. Soit dans les collectivités territoriales, que l’on ne peut légalement forcer à supprimer des postes, sauf bien-sûr à engager avec ces dernières un rapport de force inédit sous la Vème république. Soit dans la fonction publique hospitalière, dont les derniers mois de crise ont montré combien ce secteur public était plus confronté à un défi de transformation et d’attractivité que d’amaigrissement (sauf pour son administration). 

Le plus dur commence, donc, pour Valérie Pécresse, pour faire accepter son programme de la “hache” à l’ensemble des sensibilités de droite (en particulier parmi les franges plus sociale ou bonapartiste) ; mais surtout pour le rendre crédible des Français, et ce à une époque où presque partout dans le monde tous les libéraux, sans exception, ont tourné le dos à l’ultra-libéralisme, principale cause d’assèchement démocratique, politique et social. 

Pendant ce temps, le “libéral Macron” avance… Sans opposer l’économique et le social, mais bien en libérant la création de richesse au service d’une société globale. Sans copier ni importer aucun modèle, mais bien en inventant son propre modèle, avec les forces pragmatiques de droite, avec les forces pragmatiques de gauche – dans un mouvement central pour la France et les Français.