Après le Brexit, l’Europe – Installons l’Agence Européenne des Médicaments à Lens

 

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L’agence européenne des médicaments, c’est quoi ?

L’Agence européenne des médicaments ou European Medicines Agency (EMA) fait partie des 44 agences communautaires déconcentrées qui contribuent à la mise en œuvre les politiques de l’UE.

Créée en 1995, elle est implantée à Londres.

Elle a pour mission l’évaluation scientifique, la supervision et l’autorisation des médicaments à usage humain et vétérinaire sur le territoire de l’Union Européenne. Elle joue, de fait, un rôle majeur dans la promotion de l’innovation et de la recherche dans l’industrie pharmaceutique.

Pourquoi la question de sa relocalisation se pose t-elle ?

En réalité, elle ne se pose pas… ou pour être précis, pas encore. Mais à l’issue du Brexit, elle sera rapidement mise sur la table des négociations communautaires.

Le traité de Lisbonne prévoit un délai de deux ans à l’issue duquel la Grande-Bretagne et l’Union Européenne devront se mettre d’accord sur un protocole de sortie de l’Union. Cette disposition, inédite, couvre l’ensemble des champs : réglementaires, financiers et administratifs.

Or, et bien que beaucoup de questions restent en suspens, on imagine mal qu’un pays tiers puisse maintenir sa participation à l’Union sur une question aussi sensible autant liée à la sécurité sanitaire qu’à ses intérêts économiques.

Entre autres prérogatives qui devront être rétrocédées, l’Agence Européenne des Médicaments (EMA) a vocation à quitter la Grande-Bretagne dans un délai court au profit d’un autre État membre. La question est lequel ?

L’agence européenne des médicaments à Lens, n’est-ce pas ambitieux, voire irréaliste ?

Ambitieux, oui ! Irréaliste, beaucoup moins qu’on le croit !

La France accueille déjà quatre agences européennes. En accueillir une supplémentaire ne serait pas complètement infondé au regard de notre poids économique et démographique dans l’Union, par ailleurs mécaniquement rehaussé par la sortie de la Grande-Bretagne.

Il n’existe pas de critères d’implantation précis. Plutôt pragmatiques sur le sujet, les règlements européens ont privilégié la cohérence sur la centralisation. De fait, si la plupart des agences se situent au sein de grandes métropoles (Bruxelles, Cologne, Turin), d’autres se situent dans des territoires plus déconcentrés. Notons par exemple que le Bureau européen d’appui en matière d’asile se trouve à Malte, l‘Office de l’harmonisation dans le marché intérieur à Alicante ou encore l’agence ferroviaire européenne à Valenciennes.

Alors, oui – une candidature lensoise, spontanée, ne manquerait pas d’arguments… à condition de les faire valoir, avec conviction et sans délai !

Parce que la candidature lensoise s’inscrirait dans un pôle européen : le prolongement de la métropole européenne lilloise et qui, dans un souci d’aménagement du territoire ne pourra « tout absorber », le canal seine-nord…

Parce qu’elle permettrait d’asseoir une visibilité internationale initiée grâce au Louvre, mais qui reste à conforter…

Parce que vu de Milan, Londres ou Genève : Lens, c’est la banlieue de Lille, idéalement placée sur un axe Paris-Bruxelles…

Parce que tout simplement, nous le voulons ! Et qu’une telle implantation serait porteuse d’un symbole incroyablement fort dans un territoire où les indicateurs de santé restent dégradés, un territoire où l’Histoire fut marquée par le labeur. Hier terre de risques, demain terre d’excellence scientifique et sanitaire…

Cela va t-il vraiment créer de l’emploi ?

Disons-la vérité : pas directement. L’agence s’implanterait avec ses 400 collaborateurs actuellement en poste, médecins, chercheurs, juristes… Mais une part du budget de l’agence, un peu plus de 200 millions d’euros, serait réinvesti localement. C’est donc bien le pari des emplois induits qui doit être fait !

En réalité, le vrai levier est ailleurs. Et il est infiniment plus prometteur à moyen terme.

Prenons conscience de ce que représente l’EMA sur la scène internationale, aux côtés de la Food and Drug Administration aux Etats-Unis ou de l’organisation Mondiale de la Santé.

Prenons conscience des enjeux : un centre des deux ou trois grands plus grands centres décisionnels d’un marché mondial qui dépasse les 1000 milliards d’euros, qui continuera sa forte progression – et ce alors que la santé connaitra une énième révolution à l’aune du numérique, des bio et nanotechnologies…

Ces technologies, ce sont plus largement celles de la troisième révolution industrielle pour laquelle, précisément, la région Haut de France affiche son ambition et sa soif d’excellence. Mais ce projet excède, on le voit, et de très loin, la seule logique industrielle…

Si nous pensons qu’après le Brexit, notre nouvelle euro-région doit s’aider elle-même en aidant la construction européenne, alors je vous invite à relayer le plus massivement possible cet appel via vos réseaux sociaux : oui à une candidature spontanée et motivée de Lens pour accueillir l’Agence Européenne des Médicaments !

Nous avons peu de temps avant que d’autres pôles européens ne concurrencent cette idée.

 

 

L’Europe des cercles

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Les britanniques se sont prononcés en faveur de la sortie de l’Union Européenne à près de 52 %.

Bien qu’il constitue à mon sens une erreur, ce choix doit être respecté au nom de la souveraineté des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Nul ne sait ce qu’il adviendra. Mais nous devons tirer tous les enseignements.

En quelques heures, « sans rien faire » les britanniques se sont endettés de plusieurs dizaines de milliards par l’effet mécanique de la chute de la Livre Sterling. Les banques centrales mondiales se mobilisent afin de prévenir son effondrement (curieusement ni M Farage ni M Johnson n’y voient une atteinte à la souveraineté). Les porteurs d’enjeux de la City regardent vers les capitales européennes. Ireland et Ecosse revendiquent la partition. La Grande Bretagne pourrait ainsi bientôt devenir la « Petite Bretagne »…

Depuis une semaine, nous savons que l’on peut encore, en 2016, payer de sa vie l’engagement démocratique en Europe.

Depuis cette nuit, nous avons la preuve qu’eurosceptiques et nationalistes peuvent faire de l’intégration européenne un mouvement réversible, créant ainsi les conditions de ce qu’ils dénoncent : l’Europe molle, incapable de réponse aux enjeux de croissance, d’emploi, de sécurité intérieure, de diplomatie… Chacun le comprend : les Européens finiront par se lasser et laisseront plus volontiers mourir cette Europe « coquille vide » au profit d’un retour aux frontières intérieures. Le travail de sape a commencé. Ce n’est désormais plus qu’une question de temps : cinq, dix, quinze ans ? Moins ? Difficile à dire… Ce qui est certain, c’est que le processus est engagé. Qui se soucie encore de Schengen face à l’impotence de l’Union dans la crise migratoire ?

Bref, le choix de la Grande-Bretagne a beau être démocratique, il nous rappelle que la démocratie n’est jamais complètement acquise.

L’heure est grave. Car cette Europe là c’est : au mieux, la dégringolade économique et sociale face à de nouvelles puissances globales, notamment asiatiques ; au pire, la guerre.

L’heure est grave, mais paradoxalement elle peut être porteuse d’espérance si nous le décidons – car c’est dans la gravité que s’écrit, le plus souvent, l’Histoire.

A cet égard, l’Histoire des Etats-Unis est riche d’enseignements. A plusieurs reprises, la construction américaine a marqué le pas, parfois de façon fratricide et violente. A chaque fois, les Américains ont su répondre par la conscience et l’audace, là où une minorité appelait à l’isolationnisme et la division.

Aujourd’hui,  j’en appelle solennellement au Conseil de l’Europe et à l’ensemble des Chefs d’état et de gouvernement : avons-nous envie d’écrire l’Histoire des Etats-Unis d’Europe ?

Depuis trop longtemps les Européens, et en particulier les jeunes Européens qui ont à peine le souvenir de la chute du mur de Berlin, entendent parler d’Europe à travers des allégories aussi consensuelles qu’euphémisantes : l’”idée”, le “projet” d’Europe… L’Europe n’a plus besoin de mots ! Elle a besoin d’actions et, surtout, de leadership !

Il y a peu encore, la conception d’une Europe à « plusieurs vitesses » m’indisposait car telle n’était la vision que je partageais du continent et de son destin. Et d’ailleurs, ce n’est toujours pas complètement ma vision. Mais pragmatiquement et face à l’urgence, cette voie est devenue la seule possible, et surtout : une voie « urgente ».

L’Europe doit désormais s’articuler autour de plusieurs cercles concentriques.

Un premier cercle, ouvertement libre échangiste et fondé sur la convergence des normes, s’impose. Aujourd’hui délimité aux 28 Etats membres, ce premier cercle, le plus large, pourrait à terme s’ouvrir plus facilement encore à de nouveaux partenaires. Probablement, constitue t-il l’issue de négociations aujourd’hui impossibles avec Ankara ou sur la question ukrainienne dont nous sommes peut-être, sans le savoir, qu’au début.

Un second cercle, fondé sur la monnaie unique et ses principes en matière d’union bancaire et de convergence, se dessine assez naturellement. Finalement, la configuration actuelle de 19 pays.

Enfin, un troisième cercle, ouvertement fédéral, fondé sur une nouvelle constitution : un Président reconnu sur le plan international et un Parlement aux pouvoirs considérablement renforcés prenant définitivement le dessus sur la méthode intergouvernementale.

Qu’importe que nous soyons six, dix ou douze à vouloir le faire, faisons-le ! Nous ne pourrons convaincre d’autres de nous rejoindre qu’à l’issue de résultats concrets.

Nous pensons que l’Union monétaire doit être relayée de l’union économique et fiscale ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit s’engager dans une politique de « grands projets » et d’investissements ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit émettre ses propres obligations pour financer sa croissance et réguler la finance mondiale ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit mieux protéger ses frontières extérieures ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit mieux défendre ses intérêts grâce à une diplomatie et une défense commune ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit soutenir son agriculture non à travers les seules aides financières mais en pesant sur les marchés mondiaux ? Faisons-le !

Comme je l’évoquais préliminairement, la liberté des peuples à pouvoir disposer d’eux-mêmes doit primer sur tout autre principe. Démocrate, je me suis toujours battu dans ce sens. Démocrate, je continuerai. Mais la liberté ne saurait être instrumentalisée et la démocratie attaquée par ses faiblesses.

La liberté d’une minorité ne saurait obérer la liberté d’une majorité à vouloir s’adapter à la marche du monde : 9 milliards d’habitants dont la moitié sera, demain, exposée au risque climatique, le déplacement du centre de gravité de la géopolitique vers l’Asie, l’émergence de nouveaux rapports de forces y compris avec des puissances non gouvernementales, le décuplement de risques sanitaires, financiers, terroristes, la question de l’indépendance énergétique et technologique…

Assez ironiquement, je l’avoue, mais peut-être est-ce la preuve que nous avons encore à apprendre de notre propre Histoire, cette « Europe des cercles », tant dans son principe que dans sa terminologie, reprend à son compte la réflexion d’un illustre britannique quant à la place de la Grande Bretagne dans le monde… en 1946 – et chacun aura bien évidemment reconnu Winston Churchill.

Le fait est que cette « Europe des cercles » doit pouvoir offrir un cadre gradué et démocratique, allant du libre échange au fédéralisme, dans lequel chaque peuple, chaque parlement, sera libre de se positionner en conscience.

 

« Remain » or « Leave » : lequel de ces deux billets publierai-je vendredi ?

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Version 1

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L’Europe des cercles  

Les britanniques se sont prononcés en faveur du maintien dans l’Union Européenne à ( ) %.

Evidemment, l’Européen que je suis se réjouis de ce sursaut. Mais le même Européen s’inquiète des capacités de rebond réellement conférées par cette issue. Car rien, absolument rien, n’est réglé.

L’accord obtenu par David Cameron le 19 février dernier, presque en catimini de l’opinion, est intenable. Plus exactement, il fonctionne comme une « assurance verrouillage » des institutions européennes pour les dix années à venir. On peut même penser qu’un « oui » aussi timide s’inscrit, finalement, comme une « aubaine » pour la Grande-Bretagne tant il mettra cette dernière en position de force face au reste de l’Europe pour veiller à la stricte application de cet accord.

Quelque part le UKIP a plus gagné qu’il n’y parait, et avec lui l’ensemble des autres formations nationalistes en Europe. Avec l’issue du Brexit et l’accord du 19 février (d’autres suivront), les conservateurs et nationalistes créent ainsi les conditions de ce qu’ils dénoncent : l’Europe molle, incapable de réponse aux enjeux de croissance, d’emploi, de sécurité intérieure, de diplomatie. Chacun le comprend : les Européens finiront par se lasser et laisseront plus volontiers mourir cette Europe « coquille vide » au profit d’un retour aux frontières intérieures. Le travail de sape a commencé. Ce n’est désormais plus qu’une question de temps : cinq, dix, quinze ans ? Moins ? Difficile à dire… Ce qui est certain, c’est que le processus est engagé. Qui se soucie encore de Schengen face à l’impotence de l’Union dans la crise migratoire ?

L’heure est grave. Car cette Europe là c’est : au mieux, la dégringolade économique et sociale face à de nouvelles puissances globales, notamment asiatiques ; au pire, la guerre.

L’heure est grave, mais paradoxalement elle peut être porteuse d’espérance si nous le décidons – car c’est dans la gravité que s’écrit, le plus souvent, l’Histoire.

A cet égard, l’Histoire des Etats-Unis est riche d’enseignements. A plusieurs reprises, la construction américaine a marqué le pas, parfois de façon fratricide et violente. A chaque fois, les Américains ont su répondre par la conscience et l’audace, là où une minorité appelait à l’isolationnisme et la division.

Ce soir j’en appelle solennellement au Conseil de l’Europe et à l’ensemble des Chefs d’état et de gouvernement : avons-nous envie d’écrire l’Histoire des Etats-Unis d’Europe ?

Depuis trop longtemps les Européens, et en particulier les jeunes Européens qui ont à peine le souvenir de la chute du mur de Berlin, entendent parler d’Europe à travers des allégories aussi consensuelles qu’euphémisantes : l' »idée », le « projet » d’Europe… L’Europe n’a plus besoin de mots ! Elle a besoin d’actions et, surtout, de leadership !

Il y a peu encore, la conception d’une Europe à « plusieurs vitesses » m’indisposait car telle n’était la vision que je partageais du continent et de son destin. Et d’ailleurs, ce n’est toujours pas complètement ma vision. Mais pragmatiquement et face à l’urgence, cette voie est devenue la seule possible, et surtout : une voie « urgente ».

L’Europe doit désormais s’articuler autour de plusieurs cercles concentriques.

Un premier cercle, ouvertement libre échangiste et fondé sur la convergence des normes, s’impose. Aujourd’hui délimité aux 28 Etats membres, ce premier cercle, le plus large, pourrait à terme s’ouvrir plus facilement encore à de nouveaux partenaires. Probablement, constitue t-il l’issue de négociations aujourd’hui impossibles avec Ankara ou sur la question ukrainienne dont nous sommes peut-être, sans le savoir, qu’au début.

Un second cercle, fondé sur la monnaie unique et ses principes en matière d’union bancaire et de convergence, se dessine assez naturellement. Finalement, la configuration actuelle de 19 pays.

Enfin, un troisième cercle, ouvertement fédéral, fondé sur une nouvelle constitution : un Président reconnu sur le plan international et un Parlement aux pouvoirs considérablement renforcés prenant définitivement le dessus sur la méthode intergouvernementale.

Qu’importe que nous soyons six, dix ou douze à vouloir le faire, faisons-le ! Nous ne pourrons convaincre d’autres de nous rejoindre qu’à l’issue de résultats concrets.

Nous pensons que l’Union monétaire doit être relayée de l’union économique et fiscale ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit s’engager dans une politique de « grands projets » et d’investissements ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit émettre ses propres obligations pour financer sa croissance et réguler la finance mondiale ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit mieux protéger ses frontières extérieures ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit mieux défendre ses intérêts grâce à une diplomatie et une défense commune ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit soutenir son agriculture non à travers les seules aides financières mais en pesant sur les marchés mondiaux ? Faisons-le !

La liberté des peuples à pouvoir disposer d’eux-mêmes doit primer sur tout autre principe. Démocrate, je me suis toujours battu dans ce sens. Démocrate, je continuerai. Mais la liberté ne saurait être instrumentalisée et la démocratie attaquée par ses faiblesses.

La liberté d’une minorité ne saurait obérer la liberté d’une majorité à vouloir s’adapter à la marche du monde : 9 milliards d’habitants dont la moitié sera, demain, exposée au risque climatique, le déplacement du centre de gravité de la géopolitique vers l’Asie, l’émergence de nouveaux rapports de forces y compris avec des puissances non gouvernementales, le décuplement de risques sanitaires, financiers, terroristes, la question de l’indépendance énergétique et technologique…

Assez ironiquement, je l’avoue, mais peut-être est-ce la preuve que nous avons encore à apprendre de notre propre Histoire, cette « Europe des cercles », tant dans son principe que dans sa terminologie, reprend à son compte la réflexion d’un illustre britannique quant à la place de la Grande Bretagne dans le monde… en 1946 – et chacun aura bien évidemment reconnu Winston Churchill.

Le fait est que cette « Europe des cercles » doit pouvoir offrir un cadre gradué et démocratique, allant du libre échange au fédéralisme, dans lequel chaque peuple, chaque parlement, chaque porteur d’enjeu qu’il soit de nature économique ou politique sera libre de positionner en conscience.

En attendant, il m’importe de saluer les (  ) % qui ont voté en faveur du « remain ». Mais je veux également dire aux (  ) % qui ont voté en faveur du « leave » combien leur choix doit être respecté et entendu.

 

Version 2

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L’Europe des cercles  

 

Les britanniques se sont prononcés en faveur de la sortie de l’Union Européenne à (  ) %.

Bien qu’il constitue à mon sens une erreur, ce choix doit être respecté au nom de la souveraineté des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Nul ne sait ce qu’il adviendra. Mais nous devons tirer les enseignements de ces derniers mois et leur issue.

Depuis une semaine, nous savons que l’on peut encore, en 2016, payer de sa vie l’engagement démocratique en Europe.

Depuis ce soir, nous avons la preuve qu’eurosceptiques et nationalistes peuvent faire de l’intégration européenne un mouvement réversible, créant ainsi les conditions de ce qu’ils dénoncent : l’Europe molle, incapable de réponse aux enjeux de croissance, d’emploi, de sécurité intérieure, de diplomatie… Chacun le comprend : les Européens finiront par se lasser et laisseront plus volontiers mourir cette Europe « coquille vide » au profit d’un retour aux frontières intérieures. Le travail de sape a commencé. Ce n’est désormais plus qu’une question de temps : cinq, dix, quinze ans ? Moins ? Difficile à dire… Ce qui est certain, c’est que le processus est engagé. Qui se soucie encore de Schengen face à l’impotence de l’Union dans la crise migratoire ?

Bref, le choix de la Grande-Bretagne a beau être démocratique, il nous rappelle que la démocratie n’est jamais complètement acquise.

L’heure est grave. Car cette Europe là c’est : au mieux, la dégringolade économique et sociale face à de nouvelles puissances globales, notamment asiatiques ; au pire, la guerre.

L’heure est grave, mais paradoxalement elle peut être porteuse d’espérance si nous le décidons – car c’est dans la gravité que s’écrit, le plus souvent, l’Histoire.

A cet égard, l’Histoire des Etats-Unis est riche d’enseignements. A plusieurs reprises, la construction américaine a marqué le pas, parfois de façon fratricide et violente. A chaque fois, les Américains ont su répondre par la conscience et l’audace, là où une minorité appelait à l’isolationnisme et la division.

Ce soir,  j’en appelle solennellement au Conseil de l’Europe et à l’ensemble des Chefs d’état et de gouvernement : avons-nous envie d’écrire l’Histoire des Etats-Unis d’Europe ?

Depuis trop longtemps les Européens, et en particulier les jeunes Européens qui ont à peine le souvenir de la chute du mur de Berlin, entendent parler d’Europe à travers des allégories aussi consensuelles qu’euphémisantes : l' »idée », le « projet » d’Europe… L’Europe n’a plus besoin de mots ! Elle a besoin d’actions et, surtout, de leadership !

Il y a peu encore, la conception d’une Europe à « plusieurs vitesses » m’indisposait car telle n’était la vision que je partageais du continent et de son destin. Et d’ailleurs, ce n’est toujours pas complètement ma vision. Mais pragmatiquement et face à l’urgence, cette voie est devenue la seule possible, et surtout : une voie « urgente ».

L’Europe doit désormais s’articuler autour de plusieurs cercles concentriques.

Un premier cercle, ouvertement libre échangiste et fondé sur la convergence des normes, s’impose. Aujourd’hui délimité aux 28 Etats membres, ce premier cercle, le plus large, pourrait à terme s’ouvrir plus facilement encore à de nouveaux partenaires. Probablement, constitue t-il l’issue de négociations aujourd’hui impossibles avec Ankara ou sur la question ukrainienne dont nous sommes peut-être, sans le savoir, qu’au début.

Un second cercle, fondé sur la monnaie unique et ses principes en matière d’union bancaire et de convergence, se dessine assez naturellement. Finalement, la configuration actuelle de 19 pays.

Enfin, un troisième cercle, ouvertement fédéral, fondé sur une nouvelle constitution : un Président reconnu sur le plan international et un Parlement aux pouvoirs considérablement renforcés prenant définitivement le dessus sur la méthode intergouvernementale.

Qu’importe que nous soyons six, dix ou douze à vouloir le faire, faisons-le ! Nous ne pourrons convaincre d’autres de nous rejoindre qu’à l’issue de résultats concrets.

Nous pensons que l’Union monétaire doit être relayée de l’union économique et fiscale ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit s’engager dans une politique de « grands projets » et d’investissements ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit émettre ses propres obligations pour financer sa croissance et réguler la finance mondiale ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit mieux protéger ses frontières extérieures ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit mieux défendre ses intérêts grâce à une diplomatie et une défense commune ? Faisons-le !

Nous pensons que l’Europe doit soutenir son agriculture non à travers les seules aides financières mais en pesant sur les marchés mondiaux ? Faisons-le !

Comme je l’évoquais préliminairement, la liberté des peuples à pouvoir disposer d’eux-mêmes doit primer sur tout autre principe. Démocrate, je me suis toujours battu dans ce sens. Démocrate, je continuerai. Mais la liberté ne saurait être instrumentalisée et la démocratie attaquée par ses faiblesses.

La liberté d’une minorité ne saurait obérer la liberté d’une majorité à vouloir s’adapter à la marche du monde : 9 milliards d’habitants dont la moitié sera, demain, exposée au risque climatique, le déplacement du centre de gravité de la géopolitique vers l’Asie, l’émergence de nouveaux rapports de forces y compris avec des puissances non gouvernementales, le décuplement de risques sanitaires, financiers, terroristes, la question de l’indépendance énergétique et technologique…

Assez ironiquement, je l’avoue, mais peut-être est-ce la preuve que nous avons encore à apprendre de notre propre Histoire, cette « Europe des cercles », tant dans son principe que dans sa terminologie, reprend à son compte la réflexion d’un illustre britannique quant à la place de la Grande Bretagne dans le monde… en 1946 – et chacun aura bien évidemment reconnu Winston Churchill.

Le fait est que cette « Europe des cercles » doit pouvoir offrir un cadre gradué et démocratique, allant du libre échange au fédéralisme, dans lequel chaque peuple, chaque parlement, chaque porteur d’enjeu qu’il soit de nature économique ou politique sera libre de positionner en conscience.

En attendant, il m’importe de saluer les ( ) % qui ont voté en faveur du « remain ». Mais je veux également dire aux (  ) % qui ont voté en faveur du « leave » combien leur choix doit être respecté et entendu.

 

 

 

 

 

Sécurité et justice : la démocratie sur deux jambes

 

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En 2015 le cumul des budgets de la police et de la gendarmerie s’est élevé à un peu moins de 18 Md€, soit 1.67 % du PIB contre 1.87 % dans la moyenne des pays de l’Union.

Avec 5 Md€ le budget de la justice hors administration pénitentiaire représentait quant à lui  0.23 % du PIB contre 0.34 % en moyenne chez nos voisins.  Ainsi, lorsque nous consacrons 74 euros par habitant en France, les Italiens en consacrent 98, les Allemands 138 euros et les Britanniques 153.

Il convient de rester prudents en matière de comparaison tant les politiques publiques de chaque pays obéissent à des organisations qui leur sont propres. Mais le fait est que les moyens réservés à notre sécurité et à notre justice apparaissent bien insuffisants au regard des évolutions récentes de notre société.

Judiciarisation de la vie économique, violences sociales, recrudescence du terrorisme : ces  enjeux n’ont déjà plus grand-chose à voir avec ceux d’il y a dix ans alors que notre pays sortait d’une crise des banlieues sans précédent. Déjà, nous nous sentions démunis face à la délinquance des mineurs et la récidive alors en forte croissance… dix ans plus tard, démunis nous le restons.

Ainsi, mettre la France au niveau du reste de l’Union en matière de sécurité et de justice réclamerait un effort budgétaire annuel compris entre 6 et 8 Md€. Cet objectif ne doit plus en être un, mais bien se concrétiser en une politique structurée et compatible avec la politique de redressement budgétaire de la nation.

Dégager des moyens sans alourdir la dépense globale ne sera pas simple. Cela nécessitera de prendre des moyens ailleurs. Mais pas que… c’est toute une réponse sécuritaire et judiciaire qui devra être réinterrogée globalement. Nous aurions tort d’y voir une contrainte mais bien, au contraire, une opportunité.

 

Réinterroger le principe de subsidiarité

 

La France continue d’épuiser ses fonctionnaires de Police nationale et de gendarmerie dans des missions « tous azimuts ». Elles vont du maintien de l’ordre à la police judiciaire en passant par la sécurité publique et… la délivrance de procurations en période électorale ! Ce modèle a vécu.

De plus en plus de faits criminels appellent des collaborations « montantes » et « descendantes » respectivement vers l’échelon européen et territorial.

En 2014 24% des 167.785 condamnations pour vols prononcées en France ont concerné des personnes de nationalité étrangère. Cette proportion a été pratiquement multipliée par deux en cinq ans… et par quatre si on se réfère au début des années 2000.

Oh, il ne s’agit pas de jeter le discrédit sur « l’étranger », ce dont se charge très bien le Front National ! Mais bien de prendre acte d’une donnée que nous aurions tort de négliger… au risque, précisément, de laisser progresser le parti de Madame Le Pen.

La criminalité a suivi le mouvement de la mondialisation. Elle est devenue plus mobile, protéiforme, insaisissable des forces de sécurité intérieure lorsque ces dernières se cantonnent au seul cadre national. Ce n’est pas l’Europe qui est en cause mais bien l’insuffisance d’Europe.

Nous devons passer de la simple coopération à l’intégration des forces de police : la création d’un « FBI européen » constitue une réponse, non exclusive, mais aussi fondamentale qu’urgente. Rien de concret ne pourra être entrepris sans une telle construction.

Quelles raisons les Belges, Allemands ou Italiens auraient-ils à nous aider ? La réponse est simple : ils rencontrent les mêmes problèmes que nous ! Des bandes organisées, extérieures à l’espace Schengen, responsables de l’explosion des cambriolages et atteintes aux biens, sévissent sur leur passage d’est en ouest sur le continent. Que dire des auteurs des attentats du 13 novembre qui prirent le soin d’agir de façon « oblique » (en se préparant dans un Etat et frappant dans un autre), conscients de cette faiblesse…

A l’autre « extrémité », la police municipale occupe une place importante et demain, je le pense, incontournable.

Elle contribue déjà aux actions de tranquillité publique dont une part encore trop importante repose sur les forces de police et de gendarmerie, à tout le moins sur le champ contraventionnel.

Par sa bonne connaissance du terrain et des habitants, la police municipale apporte une contribution plus aidante qu’on ne l’imagine dans la résolution d’enquêtes liées aux biens et aux personnes, compétence qui reste (et restera) celle du judiciaire.

Par cette bonne connaissance du terrain toujours, elle détecte et anticipe des situations de tensions : ce qui fonde sa participation plus active, demain, au titre de la « police de proximité », dispositifs recréés et démantelés à l’envi depuis plusieurs décennies au gré des alternances politiques.

Je n’ai aucun doute que cet échelon municipal (que je qualifierais plus volontiers de « territorial ») devra prendre de nouvelles missions telle la prévention routière, notamment en milieu urbain – les chiffres préoccupants de ces cinq dernières années ne peuvent que nous en convaincre.

Bref si nous voulons que police et gendarmerie puissent se recentrer, il nous faudra remettre à plat tout un principe de subsidiarité.

Loin d’affaiblir l’Etat, ce double partage de compétence vers l’Europe et les territoires fera naitre un besoin de coordination qui, au contraire, renforcera le rôle des Préfets, voire maintiendra des sous-préfectures dont la disparition semblait, il y a peu, inéluctable. Quelle qu’en soit le scénario, il apparaît certain que la décennie à venir sera marquée par la réaffirmation du pouvoir régalien.

En attendant, on ne saurait trop inviter les exécutifs locaux à se saisir des regroupements de communes voulus par la loi NOTRE pour anticiper cette réponse de proximité au niveau des EPCI et ainsi (re)donner de la puissance publique sur des territoires abandonnés à la montée du Front National.

 

Nouveau monde, nouveaux risques, nouvelles réponses

 

Nous sommes entrés dans une séquence d’instabilité durable, contrairement à l’Etat d’urgence qui, lui, devra bientôt laisser place à un régime hybride où un contrôle plus strict par les pouvoirs judiciaire et législatif constituera la contrepartie acceptable d’une limitation des libertés individuelles.

La démocratie passe t-elle par plus de réseaux sociaux ? Incontestablement… Mais sort-elle renforcée lorsque des groupes terroristes y diffusent leurs pires atrocités ? Je ne le pense pas.

La surveillance des lieux publics, qui s’est considérablement renforcée au cours des derniers mois, doit-elle être maintenue ? Incontestablement…  Exige t-elle la présence systématique de forces armées régulières ou de police dont les priorités viennent d’être rappelées ? Probablement pas… Une mobilisation plus forte des réservistes s’impose et, vraisemblablement, à court terme la création d’une garde nationale.

La réponse pénale doit-elle demeurer l’axe « central » du système judiciaire ?  Incontestablement… La France peut-elle se contenter de la situation de sous offre pénitentiaire qui la caractérise et occasionne l’inexécution de 100 000 peines ? La réponse semble être dans la question. « Central » veut-il pour autant dire « exclusif » ? Je ne le pense pas… Les juges utilisent plus fréquemment leur pouvoir de saisie patrimoniale très tôt dans les procédures (la confiscation définitive étant alors prononcée par le Tribunal en cas de culpabilité avérée). Je suis convaincu que ce mix pénal+civil doit être encouragé, notamment en matière de délinquance financière ou d’atteintes aux biens. Cette évolution du droit et de son application me semble mieux adaptée que la condamnation à des peines théoriques… et de fait rarement appliquées, véritable incitation à la récidive.

La suspension et le recours sur les droits sociaux sont-ils envisageables ? Oui. Seraient-ils  pertinents en toute circonstance ? Probablement pas… Mais nos concitoyens ne supportent plus que l’on puisse revendiquer la solidarité nationale sans un minimum de respect de la tranquillité publique ou, simplement, des obligations parentales. Point de stigmatisation ! Mais bien un attachement à rappeler ce qui fonde notre contrat social : l’équilibre entre droits et devoirs. J’entends souvent parler « d’identité »… Il me semble que la première des identités revendiquée par les Français et Françaises, c’est celle-là – ce contrat social, cœur de la république.

 

La patrie de Rousseau, Voltaire et Montesquieu

 

Nous sommes et resterons la patrie de Rousseau, Voltaire et de Montesquieu. Ce n’est pas rien ! Dans un Etat de droit, fondé sur l’égalité, l’accès au droit revêt une question centrale.

Bien sûr, l’aide juridictionnelle a permis de promouvoir cette égalité d’accès au droit vers les ménages les plus modestes. Ce principe doit être défendu bec et ongle. Mais l’aide juridictionnelle, telle qu’elle existe aujourd’hui, induit un effet de seuil trop important. Ainsi les difficultés d’accès au droit se sont déplacées vers les classes moyennes qui apparaissent comme les grandes oubliées. Pour faire simple : on devient inéligible au-delà d’un revenu mensuel de 1500 € et la prise en charge tombe à 25 % au-dessus de 1 183 € soit… à peine le SMIC net. Cette situation n’est pas acceptable dans une société qui se judiciarise. Rehausser les seuils, augmenter le nombre de tranches ou, simplement, instaurer un crédit d’impôt rechargeable tous les trois ou cinq ans… les pistes ne manquent pas.

Bref, on ne saurait résumer une politique en quelques lignes. Mais quelques exemples permettent d’en résumer l’esprit : regarder la société avec pragmatisme, observer ce qui a fait ses preuves dans d’autres démocraties, arbitrer en fonction de résultats et non d’idéologies, expérimenter lorsque l’opinion doute ou apparaît trop divisée (plutôt que choisir l’immobilisme)… telles sont les postures que la prochaine mandature se devra d’adopter.

Sécurité et justice sont les deux jambes d’une démocratie chèrement acquise et qui a de plus en plus de mal à se tenir debout, constat plus marqué encore dans certains territoires.

Méfions-nous d’une société qui ne se sent plus en sécurité, car l’Histoire démontre qu’avant de se laisser abattre elle crée ses propres milices.

Méfions-nous tout autant d’une société qui ne croit plus en la justice, car cette même Histoire nous enseigne qu’elle tolèrera, alors, que l’on puisse se faire justice soi-même.