Voilà quatre mois que la Grande-Bretagne a exprimé son souhait de quitter l’Union Européenne. Voilà quatre mois que j’ai lancé un appel en faveur d’une candidature lensoise à la relocalisation de l’Agence Européenne des Médicaments (EMA) au sein d’un Pôle Européen : Lens-Liévin Pôle Européen.
Voici où nous en sommes ce 31 octobre 2016.
Depuis ma dernière intervention dans la presse le 26 septembre dernier, ce projet a connu deux évolutions notables : une première, de part du Conseil Régional des Hauts de France, très encourageante ; et une seconde, de la part de la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin qui, je dois bien l’avouer, pose autant de questions qu’elle n’apporte de réponses.
Première évolution : la position du Conseil Régional des Hauts de France
Comme ils s’y étaient engagés le 26 septembre dernier à mes côtés, les Conseillers Régionaux centristes ont déposé et obtenu le vote d’une motion en faveur d’une ligne stratégique « post Brexit ». Ce fut le 13 octobre, à l’issue d’une session marathonienne.
Cette motion rappelle la nécessité de maintenir un partenariat fort avec la Grande-Bretagne.
Nos liens ne sont pas exclusivement économiques – loin s’en faut ! Ils sont cimentés par l’Histoire, la libre circulation des personnes, les échanges culturels, la recherche universitaire. Bref… Brexit ou pas : ce partenariat doit perdurer dans l’intérêt des citoyens, britanniques comme européens.
C’est pour cette raison que la région Hauts de France entend faciliter l’accueil de partenaires économiques, privés comme publics, qui subiraient outre manche les conséquences du Brexit – parmi ces transferts probables figure, bien évidemment, l’Agence Européenne des Médicaments ( motion-pour-que-gb-reste-un-partenaire-privilegie-oct2016 )
Deuxième évolution : la position de la CALL
Si j’ai proposé une implantation lensoise pour ce projet, ce n’est certainement pas pour entrer en compétition avec la Métropole Européenne Lilloise comme je l’ai parfois entendu. C’est, au contraire, pour asseoir le rayonnement de la capitale euro-régionale… différemment.
Le monde a changé. Et l’émergence des nouvelles régions apporte une pierre à ce changement.
On ne saurait penser la région Hauts-de-France de 2030 comme on pensa naguère la région Nord-Pas-de-Calais ou la région Picardie de 1980 – sauf à dire tout cela, l’Europe, la loi NOTRe, la territorialisation, ça ne sert à rien, que l’on réformerait pour se payer le luxe de ne rien changer… Et on donnerait ainsi raison aux populistes… Non !
Si elle aspire à jouer pleinement son rôle de locomotive dans la nouvelle euro-région, la Métropole Lilloise se trouve confrontée à un double défi.
Le premier défi repose sur un enjeu d’aménagement du territoire : comment ne pas diminuer sa propre capacité de développement à force de développement… Les usagers de l’A1 et des TER régionaux comprendront…
Le second défi repose lui aussi, d’une certaine façon, sur un enjeu d’aménagement du territoire – plus exactement, de « fracturation territoriale ».
Si dans dix ans la « métropolisation » et ses effets supposément positifs restent un concept à 20 kilomètres de la métropole… alors c’est que nous aurons perdu le pari de l’euro-région ! Ce n’est certainement pas dans l’Audomarois ou dans l’Amiénois, où l’on aurait tendance à percevoir la nouvelle région non comme un progrès mais bien comme un éloignement, que l’on se montrera plus convaincu…
Je ne saurais toutefois rejeter la responsabilité sur mes seuls amis lillois. Certains m’interpellent de la sorte : encore faut-il que les territoires périphériques, en l’occurrence l’ex bassin minier, manifestent un tel souhait… Oui.
Et maintenant ?
Une partie du chemin a été accomplie, une partie seulement…
Le 27 septembre dernier, la Communauté d’Agglomération de Lens-Liévin a voté une motion favorable à l’EMA, relayée le lendemain par le conseil municipal de Lens… Fait notoire (historique peut-être) cette motion fut voté à l’unanimité, y compris par le Front National. Y a-t-il signal plus puissant vers les habitants et les partenaires européens ?
Alors pourquoi s’inquiéter ?
Parce que ni les élus centristes lensois ni moi, instigateur de ce projet, n’avons d’informations quant aux suites réservées.
Une telle candidature ne repose pas uniquement sur le choix du site d’implantation – bien que je préférerai un site en proximité immédiate du Louvres-Lens et du stade Bollaert afin d’accroitre la visibilité du Pôle Européen (par exemple en lieu et place du Centre Hospitalier bientôt reconstruit) et non l’ex site Noroxo tel que proposé et qui aurait, selon moi, vocation à accueillir d’autres partenaires, à terme, autour de l’Agence.
J’espère simplement que cette ingénierie de projet est en marche dans la perspective d’un dossier de candidature concret et solide.
Un dossier de candidature susceptible d’être présenté, explicité, défendu dans ce qu’il apporte pour le territoire et ses habitants.
Un dossier de candidature capable de répondre aux questions posées dans les Ministères, à la Commission Européenne, questions aussi concrètes que décisives : disponibilités foncières, passage de l’A21 à trois voies, amélioration des rotations Lille-Lesquin-Paris, nouvelle offre hôtelière… Capacité de mobilisation du FEDER, de fonds Etats, de la région…
Un dossier de candidature que l’on peut « emmener sous le bras », (et oui avant le « in », il y a parfois le « off ») chez le représentant de l’Etat, dans les cabinets ministériels, le Président de la République, la Commission Européenne…
Un dossier de candidature permettant aux élus départementaux, régionaux, nationaux et européens qui nous soutiennent de bénéficier d’éléments de langage…
Bref, telle est ma dernière préoccupation…
Cela fait bien longtemps qu’un simple courrier d’intention au Président de la République ne suffit plus ! Comme nous ne sommes plus non plus dans les années 60 où il suffisait que le Préfet décroche son téléphone pour demander à une entreprise locale d’embaucher…
Nous avons définitivement (et depuis longtemps) tourné la page de ce monde là !
Nous sommes passés à une ère de projet et de mise en crédibilité de ces projets devant les tiers. J’espère simplement que les élus de l’ex bassin minier l’ont bien compris.
Quand la cloche du Brexit aura définitivement sonné ; quand de premier territoire à avoir levé le doigt 12 heures après le vote britannique nous serons le vingtième, noyé parmi d’autres villes-candidates… il sera définitivement trop tard – et ça les habitants de ce territoire l’entendent depuis trop longtemps.